Trop souvent l’on confond vitesse et direction. Ce n’est pas parce que la direction sait quoi
changer et qu’elle informe ses équipes ou plutôt dicte à ses collaborateurs
qu’a partir de maintenant ils feront cela comme ceci, et qu’ils doivent s’y
appliquer maintenant, que le changement s’opère ! Et force est de
constater qu’agir ainsi est encore trop souvent la méthode utilisée en
entreprise, comme dans nos maisons. Pour
qu’un changement s’opère, il est clé de créer les conditions de la transition
vers l’état final désiré, bien plus que de savoir où il faut arriver. Sinon vous avez les mêmes « vieilles »
mentalités parachutées pour faire de nouvelles choses. Autrement dit, rien ne change !
Bien souvent les Dirigeants s’efforcent d’établir des mesures pour le
changement, avant même que l’effort de changement ne soit entrepris. La raison étant que les collaborateurs
doivent bien comprendre que tel changement, c’est du sérieux ! Penser ainsi c’est se tromper. La mesure ne produit que l’amélioration dans
les paramètres déjà connus. Penser le
changement en termes de comment le mesurer c’est réfléchir dans un vacuum, ou
penser dans le cadre même du contexte que l’on maitrise. Et cela veut donc dire apporter seulement de
petits ajustements ou modifications au lieu de chercher les idées innovantes et
à forte valeur ajoutée.
Pour qu’un changement réussisse en entreprise, donner accès au
« Pourquoi » et au « Quoi » du changement est absolument
requis. Moins les collaborateurs
comprennent, plus ils résistent au changement.
Cela a l’air si simple et pourtant, les exemples d’absence de
communication des Dirigeants sur ces 2 conditions, sont très courants. Sans
doute parce que les Dirigeants ont eux même souvent du mal à maitriser des
outils d’analyse et de prises de décisions stratégiques. Il est plus courant de rencontrer des Managers
qui n’ont aucune maitrise de méthodes d’analyse pour identifier les changements
majeurs dont l’entreprise a besoin, plutôt que de rencontrer ceux qui ont une pratique
réelle de ces outils (tels le PEST+ ou le 7S par exemple). Certes beaucoup ont lu sur ces points, dans
le passé. Demandez à un chef de département
s’il peut faciliter et produire une analyse de son département à partir de ces
outils et vous constaterez beaucoup de réactions paniquées. Il faut souvent rémunérer des consultants à
prix d’or pour faire un travail que tout dirigeant lambda devrait être à même
d’accomplir. Combien d’opérations
« business plan » inspirent de vraies paniques aux Seniors Managers
qui ont trois mois pour soumettre à leur Board un état des lieux et des lignes stratégiques,
et qui ne savent pas comment s’y prendre !
Et combien de ces opérations se réfléchissent au sein d’une équipe ou la
conformité règne, et où la seule diversité réside dans la couleur des cravates.
Ce n’est pas parce que des posters de vision et de valeurs s’affichent sur
les murs que les comportements et les mentalités se transforment. Les collaborateurs font souvent l’expérience
de recevoir « tout cuit » de tels messages sans pouvoir être engagés
dans le processus de leur définition.
Leur engagement se limitant seulement à recevoir positivement
l’information déjà concoctée par une poignée d’élus. C’est dommage, car il ne manque pas de méthodes
pour capturer l’imagination, le savoir et les intuitions des collaborateurs et redéfinir
ensemble les racines de la culture de l’entreprise. Par cette approche la Direction peut libérer
engagement, confiance et connaissance chez tous, avant même que les changements
ne se définissent et s’opèrent. En fait,
le principe d’implication des collaborateurs dans une réflexion sur les enjeux
d’entreprises et ses réalités actuelles est souvent vécu comme une situation
dangereuse et menaçante par les dirigeants.
Le point de vue étant que les collaborateurs sont d’emblée trop négatifs,
ne pourraient réfléchir constructivement les réalités de l’entreprise et se
perdraient à remonter leurs problèmes
actuels. Il est donc bien plus
confortable pour la Direction de ne pas s’engager dans un processus risqué, et
de définir leurs stratégies en lieu clos et petite équipe conformiste. En fait les processus sont aussi bons que le modèle
auquel ils se rattachent. Il existe de
vraies méthodologies constructives pour créer, à tous les échelons de
l’entreprise, la conscience que le changement est vital et que cela doit
passer avant tout par une transformation des mentalités de chacun et des
comportements, puis des systèmes et des structures d’entreprise. La création de cet état
d’ « awareness » chez tous est la grande condition de succès du
changement. Vous aurez beau savoir où
aller, et pointer du doigt sur la destination, ou pousser les gens sur le
chemin, cela ne fait pas le chemin, et cela ne crée pas, maintenant, chez
chacun, l’envie de marcher. Vous pourrez
toujours dire : « que celui à qui cela ne plaît pas, quitte la
route !» ou vous satisfaire que beaucoup avancent « sans
tapage » pour croire que c’est bon.
Ces attitudes ne sont pas effectives.
Manager le changement c’est manager la dimension humaine du changement.
L’objectivité du changement (pourquoi et quoi) est seulement la première
des conditions. Et elle devient une
vraie énergie de transformation uniquement si l’entreprise utilise une méthode
qui permet d’associer l’imagination, la connaissance et l’envie des collaborateurs
pour réfléchir aux enjeux de l’entreprise et transiter vers une nouvelle réalité.
« Doucement, doucement »
disait Talleyrand à son cocher, « je suis pressé ! ».
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